Armand Buisson : "Ce qui me plaît le plus, c'est de voir les gens prendre plaisir et vibrer sur mes playlists."

Petit nouveau parmi les DJs français, nous vous l’avions présenté dans un de nos articles pour enrichir vos playlists. C’est l’occasion d’en savoir plus sur Armand en lui demandant ce qui l’a amené à être DJ et comment il prépare ses sets.

Adrien Guesnel

11 min de lecture

Armand Buisson : "Ce qui me plaît le plus, c'est de voir les gens prendre plaisir et vibrer sur mes playlists."

WB: Hello Armand, tu viens de la communauté parisienne, est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur toi ?

Armand : Avec plaisir ! Je m'appelle Armand Buisson, j'ai 33 ans et je viens de Paris. Pour celles et ceux qui ne me connaissent pas, en soirée ou événement cherchez le gars en short avec une serviette dans la poche.

Ma découverte du West Coast Swing s'est faite en 2012. Ma partenaire de vie de l'époque voulait partager sa passion pour la danse avec moi. Après un essai infructueux avec la Salsa et plusieurs refus d'essayer d'autre danse j'ai craqué et essayé le West Coast Swing.

Il m'a fallu 3 bonnes années pour surmonter mes peurs et vraiment me lancer en soirée, c'était à l'occasion du Ski West 2015. Depuis la passion en moi ne fait que grandir et aujourd'hui c'est dur de lever le pied 😅

WB : Comment t’es-tu retrouvé devant les platines ?

Armand : Rapidement j'ai été attiré par le rôle de DJ. C’était déjà quelque chose que je faisais parfois sur des soirées non dansantes entre amis.

A l'époque, il y avait de gros noms à Paris comme Rodolphe ou Laurent alias DJ GBL il était donc difficile d’avoir des possibilités.

Au fur et à mesure j'ai commencé à avoir quelques opportunités, notamment au Temple du Swing où j'enseignais aussi à l'époque, mais rapidement elles se sont faites plus rares pour que j'envisage d'aller plus loin dans la réflexion.

Et puis pendant la période de COVID, l'idée a commencé à me traverser la tête de nouveau mais je me posais pas mal de questions quant à ma capacité ou légitimité à être DJ en soirée ou événement.

Quelques semaines avant le Westy Nantes 2022 une amie m'a conseillé de tenter ma chance et j’ai contacté Arnaud Perga qui m'a permis de jouer un set durant la soirée du dimanche, j'ai adoré l'expérience et ça m’a poussé à en faire plus souvent.

J'ai donc commencé à solliciter les organisateurs des événements où j'allais pour avoir des opportunités et j'ai pu commencer à me faire la main.

Et puis en novembre 2022, Olivier Massart m'a contacté sur recommandation d'un collègue DJ pour faire partie de l'équipe du Westie's Angels. Ce fut une expérience incroyable pour moi avec notamment un set de 2h30 le samedi soir pour fermer la soirée. Les gens m’ont fait des retours très touchants tout le weekend et je pense que ça a un peu lancé mon histoire de DJ en événement.

Depuis j'ai eu la chance de rencontrer des gens qui me font confiance et qui m'offrent l'opportunité de jouer des sets pendant les plus gros événements français.

Pour celles et ceux qui veulent mettre un visage sur Armand, ah mince mauvaise photo. Crédit photo: Tumbao Pix

WB : Ton nom de DJ est DJ Bro, est-ce que tu peux nous en dire plus sur ce choix ?

Armand : Je ne cherchais pas particulièrement de pseudo parce que je n'imaginais pas que ça deviendrait sérieux. Mais des amis en soirée me demandaient mon pseudo donc j'ai essayé d'y réfléchir un peu. A cette époque (avant la pandémie), j'avais une coupe de cheveux qui demandait pas mal de préparation et notamment le fait d'utiliser un sèche-cheveux. Un premier nom en est sorti : DJ Brushing. Et puis une danseuse, qui devait me trouver sympa 😅, l'a remixé en DJ Bro-shing ("Bro" diminutif de brother en anglais, qui est aussi une façon d'interpeller un ami). Et puis cette année au WIL on devait choisir un nom de DJ, pour l'afficher sur la structure, avec un nombre de caractères limité donc j'ai abrégé en DJ Bro.

C'est celui qui reste maintenant quand on me le demande même si j'y porte peu d'importance. J'aime bien DJ Armand aussi car j'ai la chance d'avoir un prénom peu répandu.

WB : Qu’est ce qui te plait dans le fait d’être DJ ?

Armand : Il y a plusieurs choses qui me plaisent dans le fait d'être DJ, la première c'est que je peux danser (quand les circonstances le permettent) sur des musiques que j'aime 😅.

Blague à part, j'apprécie énormément quand les gens viennent me voir pour me dire qu'ils ont aimé (voir adoré parfois 😁) mes sets, qu’ils ont découvert une nouvelle chanson qu'ils ont adoré.

Mais ce qui me plaît le plus aujourd'hui c'est simplement de voir les gens prendre plaisir et vibrer sur mes playlists.

WB : Comment définirais-tu ton style musical ?

Armand : Je vais vous donner un peu de contexte sur mon éducation musicale 😅

J'ai grandi dans la même chambre que mon grand frère, donc à l'époque il avait le pouvoir sur la musique que j'écoutais et donc j’écoutais surtout du rap ou de la funk.

En arrivant au West Coast je n'écoutais absolument pas de Pop Mainstream, mais c'est grâce à quelques titres issus de mon enfance (donc plutôt Hip-Hop) que je me suis accroché à la danse.
Même si aujourd’hui ces titres que j’écoutais plus jeune ne me donnent pas forcément envie de danser dessus.

Depuis, j'ai découvert énormément de nouvelles sonorités qui me portent en tant que danseur.

Aujourd'hui je dirais que mon style est assez varié, j'essaie d'apporter un maximum de style différent quand je fais un set de la pop, des musiques électro, de l'afrobeat, de l'acoustique.

WB : Est-ce qu’il y a un style avec lequel tu as plus de difficulté à l’intégrer à un de tes sets ?

Armand : J'ai effectivement du mal à proposer des musiques qu'on décrit comme blues (la plupart n'en sont pas) alors même que j'aime beaucoup les danser.

Mais je peux l'expliquer par la façon dont je réfléchis quand je joue de la musique.

Je m'appuie sur le concept de Flow expliqué par le DJ américain Koichi Tsunoda. L'idée c'est que pour choisir une chanson j'ai besoin de la connecter d'une manière ou d'une autre à la précédente.

The “Flow”
Often my DJing has been described as “having a good flow.” Though how I DJ has morphed over the past few years, I found myself explaining…

Aujourd'hui mon répertoire de musiques "blues" n'est pas assez étoffé pour que j'arrive naturellement à faire ces connexions.

Il faut aussi dire que ce sont rarement les chansons préférées des danseurs en soirées et en tant que DJ nous sommes là pour répondre à leurs attentes.

Mais j'ai prévu d'en intégrer de plus en plus à mes sets prochainement.

WB : Est-ce qu’être DJ ça t’apporte quelque chose en plus dans ta danse ?

Armand : A part le fait que je connais beaucoup de chansons par cœur pas vraiment 😅. Mais du coup je n'arrive pas à m'empêcher de chanter quand je danse et on m'a même dit que ce n'était pas forcément apprécié en compétition.

Sinon je pense plutôt que le fait d'être un danseur actif m'apporte plus en tant que DJ que l'inverse. Parce que je sais ce que j'attends en tant que danseur d'un DJ.

Rare photo d'Armand qui ne fait pas de karaoké lors d'une compétition. Crédit photo: Tumba Pix

WB : Est-ce que tu te prépares tes sets avant un évent ?

Armand : D'une certaine manière oui, j'écoute énormément de musique à la recherche de nouveaux morceaux. Et je cherche constamment la meilleure manière de les enchaîner.

Il y a aussi pas mal de travail en amont sur l'organisation de ma librairie pour être le plus efficace pendant un set.

En général, avant un événement je vais essayer d'identifier quelques chansons que j'aimerais tester, parce que je n'ai pas d'opportunités de jouer des sets dans ma communauté locale, et de trouver comment les amener.

Parfois aussi je me lance des défis sur des thèmes que je maîtrise moins. Récemment j'ai essayé d'intégrer plus de musique acoustique à mes sets parce que je n'en passais jamais.

Mais lorsque je m'installe derrière le DJ Booth je n'ai rien de prêt. Je préfère être présent durant le set de mon prédécesseur pour sentir l'énergie de la salle et m'adapter pour emmener les gens vers ce que j'ai envie de proposer.

Ensuite après les événements je réécoute régulièrement mes derniers sets pour essayer de voir si j'aurais pu faire mieux. C'est pour ça que vous pouvez les trouver sur Spotify 😅 (bon aussi pour que les gens puissent se replonger dans l’événement d’une certaine manière)

Armand derrière les platines. Crédit photo: Tumbao Pix

WB : Le sujet du volume sonore est de plus en plus présent dans les évents West Coast Swing, comment prends-tu en compte ce point ?

Armand : En tant que danseur j'aime bien être submergé par la musique et qu'elle soit du coup plutôt forte, mais quand je DJ je m'adapte au besoin des danseurs.

C'est souvent très difficile pour nous DJ car nous avons rarement un bon ressenti du volume au niveau du DJ Booth.

Quand je le peux j'essaie de parcourir la salle au début de mes sets pour évaluer le niveau sonore, sinon je demande à un DJ ou un ami de le faire pour moi.

Les feedbacks des danseurs aident aussi, alors n'hésitez pas à venir nous voir si la musique est trop forte, ou d'en parler à l'organisation qui peut nous le remonter pour améliorer les choses.

WB : Tu as pu faire DJ au French Open et même au Budafest, ça fait quoi de se retrouver au DJ Booth dans de gros évents comme ceux-là ?

Armand : C'étaient des expériences incroyables pour moi. Ces deux événements ont une saveur très particulière pour moi en tant que danseur.

Au Budafest, je n'ai participé qu'à la soirée du jeudi et j'étais pas mal stressé. Du coup les premières chansons que j'ai passées étaient difficiles à apprécier. J'étais beaucoup dans l'appréhension que quelque chose se passe mal (surtout que ça m'était arrivé une semaine avant à Avignon 😬). Après quelques minutes en voyant que les danseurs réagissaient bien à mon set j'ai pu me détendre.

Le French Open était différent parce que j'étais plus expérimenté, et présent sur les 4 soirées, donc moins sujet au stress (et avec une machine plus fiable 😅), mais les sensations ont été assez incroyables. Notamment les soirées du vendredi et samedi ou j'ai réellement senti une osmose entre moi et la salle. J'ai eu l'impression que les danseurs appréciaient presque toutes les chansons que je passais. Et même si ça me démangeait d’aller danser sur mes chansons, j’ai pris un pied incroyable à juste regarder la salle comble profiter de la musique.

J’ai aussi eu la chance de participer au West In Lyon cette année et prochainement au WOTP. Tous ces événements sont à part, parce que l’envie de bien faire est décuplée par le fait qu’ils sont importants pour les danseurs.

Mais au final tous les événements sont importants à mes yeux et ma priorité c’est de m’assurer que les danseurs passent un bon moment, et pourquoi pas créent des supers souvenirs sur une de mes playlists.

Armand ou un avenger à la retraite, on ne sait plus trop. Crédit photo: Tumbao Pix

WB : Est-ce que tu as une anecdote à nous raconter sur une de tes expériences ?

Armand : C'était au Avignon City Swing en début d'année 2022, je prends mon set durant le pic de la soirée. Durant la deuxième chanson mon logiciel de DJ décide de planter sans prévenir. J’ai du mal à faire repartir la musique dans un premier temps et du coup un certain nombre de personnes commence à s'agglutiner autour du DJ Booth, des pros, des DJ, l’organisation qui venaient pour m’aider. Via mon travail j’ai l’habitude de gérer des situations d’urgence et j’ai l’habitude de garder mon calme. Mais là ça commençait à faire trop de gens à gérer en plus de mon problème technique.

Au bout d’un moment un ami est venu me voir en plus de tout ce monde et lui j’ai pu l’envoyer bouler en lui demandant de me laisser de la place. Ça m'a permis de me reconcentrer et la musique est finalement repartie. J’ai pu aller le voir pour m’excuser et le remercier parce que c’était le seul que je pouvais envoyer bouler sans qu’il ne le prenne mal.

Moral de l'histoire, en cas de problème technique laissez-nous respirer un peu on va trouver une solution 😅

WB : On te lance un petit challenge : tu es au Budafest et tu as carte blanche, quelle musique choisirais-tu pour le pro-show des couples suivants :

  • Emeline & Jakub
  • Ben & Victoria
  • Semion & Maria

Armand : Question difficile parce que l’exercice du pro-show est particulier.

Mais si j’avais carte blanche, je choisirais Secret de Louane pour Emeline et Jakub, Basic de N I G H T S pour Ben & Victoria et Bottle Tops de RITUAL & Mononoke pour Semion & Maria.

Tout simplement parce que ce sont 3 chansons que j’adore et je pense que ces danseurs seraient capables de les sublimer et de nous transmettre des émotions en dansant dessus.

Armand concentré lors d'un de ses sets. Crédit photo: Tumbao Pix

WB : Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui veut commencer à être DJ ?

Armand : Trouver le plus d'opportunités possibles pour pratiquer. Je suis un bien meilleur DJ aujourd’hui que je ne l'étais il y a quelques mois.

Il ne faut pas hésiter à solliciter les organisateurs de soirée dans votre communauté locale, les organisateurs d'événements ou les head DJ pour avoir des sets en guest durant les événements où vous participer.

Et surtout limiter les prises de risques, dans l’article que vous avez publié sur les 7 conseils pour faire un bon set, vous mettez le doigt sur un défaut que l’on peut avoir quand on commence.

Au début on cherche à faire découvrir le plus de nouveaux sons possibles pendant les quelques opportunités que l’on obtient, mais souvent c’est la mauvaise approche selon moi.
Il faut plutôt limiter la nouveauté au début et se construire en tant que DJ, ce sera plus facile par la suite d’introduire des découvertes et de les faire accepter par les danseurs parce qu’ils savent que vous pouvez faire mieux.

WB : Un dernier mot à nous dire ?

Armand : Merci de me donner l'opportunité de parler un peu de moi et de donner de la visibilité aux DJs. J'aime beaucoup ce que vous faites sur votre blog et c'est un honneur pour moi d'y être mis en avant.

Et aussi un grand merci à tous les gens qui viennent me voir en événement pour me donner des retours. Ça me touche beaucoup de sentir que ce que je peux proposer plaît aux gens.

WB : Merci beaucoup Armand d'avoir répondu à nos questions, on a hâte de danser de nouveau sur tes playlists !

Armand : Et j'ai hâte de vous voir danser sur mes futurs playlists 😊

Écrit avec passion par ...

Adrien Guesnel
Adrien Guesnel

Strasbourg

J'ai découvert la danse avec la Salsa puis j'ai essayé plusieurs danses : Bachata, Kizomba... Mais c'est définitivement le WCS que je préfère ! Mon but est de vous faire découvrir et aimer cette danse

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