Se mettre sur son 31 avec Clémence Ramirez

Pauline Lagarde

9 min de lecture

Se mettre sur son 31 avec Clémence Ramirez
Clémence Ramirez

Il est toujours intéressant d'en apprendre un peu plus sur les coulisses d'un milieu, sur les gens et les éléments qui sont peu présents sur le devant de la scène mais qui sont pourtant bien là, et sans qui peu de choses auraient lieu. Le milieu du West Coast n'y fait bien sûr pas exception.

Aujourd'hui, nous avons décidé d'en apprendre un peu plus sur un domaine assez pointu, la confection de costumes de scène dans le cadre du West Coast Swing. Nous avons donc contacté Clémence Ramirez, qui a accepté avec plaisir de répondre à notre interview :).

WB : Bonjour Clémence ! Avant toute chose, peux-tu nous dire quelques mots sur toi ?

Clémence : Hello Westie Babies ! Je m’appelle Clémence, j’ai 22 ans et je vis dans le sud de la France, à Toulon. Je danse depuis l’âge de 3 ans, je suis passée par la danse solo, mais étant issue d’une famille de danseurs avec des parents ayant une école de danse, j’ai pratiqué aussi plusieurs danses à deux en loisir et en compétition comme le boogie, le rock sauté et le West Coast Swing.

WB : Quel parcours as-tu réalisé pour arriver à la confection de costumes ?

Clémence : Les costumes de danse m’ont toujours fait rêver. En réalité pour être honnête ce qui m’a toujours plu c’est tout ce qui avait des strass et des paillettes :P
C’est pour cela qu’après mon bac j’ai décidé de faire un BTS « design de mode », mon but était de faire des tenues de scène. Mes projets ont dû changer deux ou trois fois pendant mes années d’études parce que ce n’étaient pas des projets très appréciés par mes professeurs, mais cela ne m’a pas empêchée de rester sur ma décision initiale.

Après 3 ans d’études je suis donc sortie de l’école avec mon BTS en poche, mais étant consciente qu’il me fallait me spécialiser, j’ai fait des formations complémentaires avec des professionnels spécialisés dans les tenues de scène, de spectacle, mais aussi de danse et de patinage. Me sentant correctement formée et expérimentée je me suis lancée ! :)

WB : Qu'est-ce qui te plait dans le fait de réaliser des costumes de scène ?

Clémence : Ce que j’aime dans la création de costumes, c’est que chaque projet est différent, ils racontent tous quelque chose. C’est un univers créatif et incroyable.

Le contact qu’on a avec les danseurs n’est que pur plaisir. Le meilleur moment bien sûr c’est celui où l’on voit les danseurs découvrir les tenues, de lire l’émerveillement dans leurs yeux et de savoir que ce sera la touche finale sur des mois et des mois de travail pour eux.

WB : Quelles sont tes différentes sources d'inspiration ? As-tu des artistes modèles ?

Clémence : C’est quelque chose de difficile à dire. La folie et le bizarre m’inspire en général, des idées qui peuvent paraître loufoques.

Au niveau des artistes, je dirais que Lady Gaga est la femme la plus incroyable qu’il soit ! Sa folie est quelque chose qui me fascine. Katy Perry est aussi un personnage qui m’inspire beaucoup haha !

WB : Chez Westie Babies, nous n'y connaissons pas grand-chose en couture (Adrien sait à peine recoudre un bouton). Peux-tu nous expliquer les différentes étapes pour réaliser un costume ?

Clémence : Mais bien sur :)
Tout d’abord il faut que je me familiarise avec les danseurs et qu’on discute de leur projet. Une fois que les bases sont posées, il y a une phase dessins pour que je puisse leur donner un aperçu de ce que j’imagine pour eux. Une fois que tout est ok pour eux alors c’est parti !

On peut enfin passer au patronage qui consiste à voir le schéma de la construction d’un vêtement à plat. Une fois le patronage fini on découpe les patrons dans un tissu test qui va nous permettre de voir si la taille va aux danseurs. S’il y a des retouches à faire, alors elles seront faites sur le costume test. Si la taille est bonne, alors on peut le faire avec les bons tissus. On vérifie les systèmes de fermeture, les petits fils qui dépassent. Une fois qu’on a cousu, surjeté et piqué on peut faire les finitions comme les strass, les perles… et enfin nous aboutissons à la tenue finale !

WB : Combien de temps cela prend-il en moyenne ?

Clémence : En moyenne pour la conception des costumes d’un couple de danseurs il faut compter entre 3 et 6 mois selon ce qu’il faut modifier et le nombre de strass à poser. Il faut ajouter à cela bien évidement les commandes de matériaux spécifiques aux différentes tenues et le travail d’étude et création artistique.

WB : Comment se déroulent les essayages et les échanges avec les danseurs, pour notamment que leurs tenues correspondent à leurs goûts et à leurs attentes ?

Clémence : Comme je l’ai dit juste avant, il faut organiser un premier rendez-vous avec les danseurs. On discute de leurs préférences, la musique, la ou les significations, l’intention, les couleurs, le style et l’atmosphère de la routine. Ils peuvent me montrer des références, n’importe lesquelles qui auraient pu les inspirer pour leurs futures tenues. Ensuite on prend les mensurations, et à partir de là je peux commencer à travailler.

Je reste en contact régulièrement avec eux en leur envoyant les propositions que j’ai imaginées. S’il y a possibilité, après le choix graphique des tenues, de se voir en présentiel c’est parfait, sinon en Visio c’est aussi possible. Les premiers essayages test seront directement rectifiés avec moi. Si une distance trop importante nous sépare, nous fonctionnerons par colis et Visio. Il est important pendant l’essayage de se voir devant un miroir et de dire touuuus ses ressentis pour que je puisse au mieux répondre à la demande.

Enfin lorsque tout est fini ainsi que la pose de strass ou autres, l’essayage final a lieu et les costumes peuvent être testés en réel (parce que la plus grande peur des danseurs c’est que les strass partent en feu d’artifice à la première traversée). C’est pour ça qu’il faut compter entre 3 et 6 mois pour ne pas être dans le rush avec du stress.

WB : Y a-t-il des consignes particulières propres au West Coast quant au choix et à l'aspect des tenues de show ? Nous pensons notamment aux tenues portées pour les chorées présentées à des évènements de grande ampleur comme l'US Open.

Clémence : Il y a toujours des règles. Cependant il y a aussi beaucoup de manières de jouer avec, afin d’obtenir ce que l’on veut. Bien sûr on ne peut pas faire n’importe quoi avec certaines choses comme par exemple la transparence sur certaines zones des tenues. Mais l’imagination peut aller très loin, tant que la danse est praticable avec la tenue. Un des basique incontournable est le pantalon, qu’il soit homme, femme, chino, taille haute, taille basse, évasé ou skinny…C’est ce qui est le plus utilisé lors des routines. Ce qui est compréhensible, mais d’autres variantes se sont déjà vues comme des robes ou des shorts. La danse reste un art où l’on peut s’exprimer par bien des façons.

WB : Existe-t-il des différences dans les gammes de costumes, selon par exemple si l'on souhaite se produire uniquement dans des petits events ou si l'on désire performer dans des events prestigieux ?

Clémence : Libre à chacun de choisir ! Il est possible d’avoir un costume plus simple pour les petites représentations et sortir le vrai costume pour l’US Open par exemple, comme il est possible de le montrer dès le début. La plupart des danseurs utilisent directement le vrai costume. C’est quand même la finition de tout le travail fourni, cela n’aura pas le même impact sans le costume créé pour la musique et la chorée.

Pour moi la tenue fait pleinement partie de l’œuvre artistique, c’est une symbiose, la musique, la tenue, la chorégraphie et bien évidement l’interprétation des danseurs. Pour qu’une routine soit une vraie réussite tous ces éléments doivent concorder.

WB : Existe-t-il des couleurs à privilégier ou bien au contraire à bannir ?

Clémence : La couleur la plus utilisée est le noir, simple, efficace. Cependant on peut oser n’importe quelle couleur pourvu qu’elle soit en rapport avec la routine et la musique. De mon point de vue, il est primordial que tout concorde. On pourrait autant porter du noir et blanc qu’un arc-en-ciel tant que celui-ci est bien réalisé et reste dans le thème.

WB : Nous imaginons que c'est une gageure d'avoir un costume esthétique tout en étant fonctionnel et adapté pour la danse. Comment arrives-tu à concilier ces deux éléments ?

Clémence : Pour rester aussi bien fonctionnel qu’esthétique il est primordial d’avoir les matériaux appropriés. Une bonne étoffe c’est ce qui va faire les bases de la tenue. Une fois que celle-ci est bonne, les découpes et la forme de la tenue seront déterminées en fonction des chorégraphies choisies. Une tenue de Showcase en particulier doit être pensée aussi en fonction des accros, Il ne peut pas y avoir de grande lanière qui sorte ou autre par risque de rester coincé. Pour un Classic cela revient au même mais il y a beaucoup moins de contraintes. À peu près tout est réalisable, il y aura toujours un moyen de se rapprocher au maximum de l’effet attendu.

WB : Nous avons vu que tu as réalisé les jolies tenues de Marine Moinault et Rémy Quaglierini pour leur Routine présentée au dernier Westie's Angels. Comment cette idée est-elle née ?

Clémence : La tenue est née de la signification de la musique. Rémy et Marine m’ont bien évidemment donné leurs exigences au niveau des tenues : une combinaison à manches longues proche du corps pour Marine, et un haut à manches longues et pantalon pour Rémy, ainsi que plusieurs autres petits détails de ce qu’ils appréciaient. Ils n’avaient pas d’idée particulière pour la tenue alors je leur ai fait des propositions, et cela à partir de la traduction des paroles de leur musique «Vertigo».

La combinaison portée par Marine

Cette musique dramatique et puissante parle d’une panique qui mène à un vertige. Le vertige a donc pour couleur associée le vert. Le noir étant celle qui s’accordait le mieux à l’atmosphère, cela nous a servi de base pour la tenue. Avec une musique dynamique j’ai décidé de choisir des coupes franches et dans les lignes du corps. Toutes les lignes vertes sur les parties nude représentent ce vertige. Être sur le fil, ne pas faire de faux pas. C’est donc la limite qui est imagée. Et bien sûr les strass sont présents pour mettre du pep’s dans la tenue sous les feux des projecteurs.

WB : Y a-t-il un projet de costume qui t'a particulièrement marqué ?

Clémence : Pour l’instant il s’agirait d’un projet en cours qui ne devrait pas trop tarder à sortir…
Indice : les personnes concernées sont des membres de ma famille :)

WB : As-tu d'autres projets en vue ?

Clémence : Tellement…je dirais beaucoup trop mais il n’y en a jamais trop !
Plein d’idées en tête et énormément d’objectifs mais surtout d’ouvrir mes costumes à d’autres disciplines.

WB : Un dernier mot à nous dire ?

Clémence : Croyez en vous ! Je ne suis qu’au début de ma carrière mais c'est ce qui m’a permis pendant mes études de pouvoir avoir la chance de vivre de ce qui me fait vibrer. Pouvoir concilier mes passions pour en faire ma vie c’est ce qu’il pouvait m’arriver de mieux.
Et bien sûr si vous avez la moindre question pour des projets je vous répondrai avec plaisir !

WB : Merci beaucoup Clémence d'avoir répondu à nos questions, on espère se retrouver très vite sur les pistes ! :)

Clémence : Merci à vous ! Et merci de m’avoir donné la parole, c’est vrai qu’on n’est pas très nombreux dans ce milieu. Ça a été un véritable plaisir de répondre à vos questions et aussi de partager mon métier passion et mon univers avec vous !
À très vite sur les pistes !!

NB : Après avoir lu l'article, Adrien a tenu à préciser qu'il sait parfaitement recoudre un bouton.

Écrit avec passion par ...

Pauline Lagarde
Pauline Lagarde

Paris

Expatriée dans la capitale, elle n'en oublie pas pour autant ses racines alsaciennes et revient fréquemment sur Strasbourg pour danser et surtout pour martyriser Adrien.

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